The role of subaltern cultural medias among the indigenous peoples in Great China: semantic analysis, implications and translations

Le rôle des médias culturels subalternes chez les peuples indigènes du monde sinophone: analyse sémantique, enjeux et traductions

Cheong Kin Man

Freie Universität Berlin, Allemagne

Abstract

The paper aims to discuss the role that visual anthropology and subaltern cultural medias play among the considered indigenous peoples in the Chinese speaking world, and particularly in the four cross-Strait territories of China, Taiwan, Hong Kong and Macao. This paper suggests a semantic and historic analysis of the terms of indigenous, while retracing the arrival of these western concepts in Greater China as well as the manipulations and translations along history which are subjects of the present research. The western discipline of visual anthropology, together with cultural medias find their equivalences in these Chinese speaking territories, and are used for multiple purposes, which are not always clear. An analysis of their presence and use in these four territories by their respective administrations or by the indigenous themselves may allow us also to have a more precise understanding of the ties that each of these governments maintains with its constitutionally and potentially indigenous peoples. Finally, it will be stressed the fact that the reappropriated western labeling of the indigenous may not necessarily work in the specific theoretical context of the Chinese speaking world while attention should be paid to potentially subaltern groups in individual cases.

Keywords: Visual anthropology, Media Anthropology, Indigenous Media, Ethnic Minorities, Subaltern.

Introduction

Suites aux circonstances et événements concernant les minorités ethniques officielles de certaines régions autonomes de la République populaire de Chine qui ont engendré des polémiques dans les médias, comprendre et analyser sémantiquement l’appropriation du concept d’indigène par les langues chinoises ne semble pas seulement académiquement intéressant, c’est également devenu un besoin intellectuel urgent. Au travers d’une analyse plus détaillée de la problématique des traductions des termes relatifs à l’indigène dans différents territoires du monde culturel de langues chinoises, cet article mettra en lumière les enjeux que la compréhension et l’adaptation du concept occidental d’indigène soulève. En tant qu’anthropologue visuel et ancien interprète-traducteur du Département des affaires linguistiques de Macao - organisme public succédant la Direction des affaires chinoises de l’ancienne colonie portugaise -, l’auteur de cet article voit dans la plupart des cas d’appropriation du concept d’indigène principalement des processus de constantes traductions et retraductions. Ces processus d’appropriation sont particulièrement remarquables dans les traductions entre l’ensemble des langues regroupées sous la nomination de chinois et les langues occidentales. Le but de cet article est d’analyser les différentes compréhensions du concept d’indigène et ses différentes traductions en chinois au sein des quatre territoires de langues chinoises que sont la Chine, Taïwan, Hong-Kong et Macao, territoires pour lesquels le présent article donnera quelques exemples afin d’illustrer au mieux les différentes compréhensions. Pour rappel, les quatre territoires précités sont tous membres de l’Organisation mondiale du commerce bien que, curieusement, uniquement la Chine et Macao en tant que région administrative spéciale chinoise ne se retrouvent parmi les membres de l’Unesco. En donnant une vue d’ensemble des médias culturels subalternes de ces mêmes quatre territoires sinophones, l’auteur soulèvera de plus la question de la représentation et de la compréhension des peuples reconnus indigène. La présentation des médias culturels propres à ces peuples subalternes permettra de plus également à l’auteur de faire le lien avec l’anthropologie visuelle dans sa version appropriée par les sinophones et le rôle que cette discipline a joué et joue encore dans les relations qu’un territoire peut entretenir avec ses propres indigènes.

En tant que membre des Nations unies qui a signé la Déclaration des droits des peuples autochtones, la République populaire de Chine continue de substituer l’idée de minorités ethniques à un quelconque problème d’indigénité sur son territoire. Taïwan, constitutionnellement encore République de Chine, reconnait quant à elle l’asymétrie historique que ses peuples indigènes ont vécus en empruntant directement le concept occidental d’indigène approprié lui-même de l’Occident par son ancien colonisateur le Japon. Hong-Kong, ancienne colonie britannique, et aujourd’hui région administrative spéciale chinoise, reconnait l’existence d’une population indigène qui jouit de plus de « droits spéciaux » non-partagés par le reste de la population et qui profite de ce fait d’une position politique prestigieuse. A Macao, ancienne enclave portugaise et deuxième région administrative spéciale de la Chine, la curiosité réside dans le fait que ces sont les anciens médiateurs entre les colonisateurs et les colonisés - un groupe de luso-descendants - qui sont précisément appelés les « natifs » par les anciens colonisés, et ce jusqu’à aujourd’hui encore. Dans un même temps, l’indigénité officielle des colonisés est à présent complètement oubliée. Probablement des suites de barrières linguistiques - c’est du moins ce qu’il semblât à l’auteur lors de son curriculum de Master en anthropologie visuel et des médias à la Freie Universität de Berlin -, les peuples identifiés officiellement comme indigènes dans le monde de langues chinoises, ainsi que les peuples qui sont dans cette même région linguistiques considérés comme tels par les chercheurs occidentaux, n’ont dans la majorité des cas pas attiré à eux le degré d’attention de l’anthropologie visuelle de langues européennes que les « aborigènes », « indigènes » ou « premières nations » des Amériques ou d’Océanie ont jusqu’alors reçu, et c’est en ce sens précisément que présenter, dans le milieu académique occidental, l’appropriation du concept occidental d’indigène en Asie de l’Est prend de son sens et de son urgence. Cet article n’a de loin pas pour but de prendre la parole à la place des peuples concernés et de défendre ou rejeter leur indigénité, son intention est plutôt de relativiser justement cette catégorisation d’indigène en faisant référence au nombre de ces autres peuples qui, malgré qu’ils se retrouvent parfois classés dans la catégorie des majorités, se situent bien souvent dans des situations d’asymétrie de pouvoir et d’hégémonie culturelle qui les rapprochent de ceux qui ont été catégorisés indigène avec toutes les ambiguïtés que peut soulever ce mot. L’idée de relativiser cet étiquetage d’indigène permettra également de mettre en lumière la manipulation dont cet étiquetage fait l’objet dans cette région linguistique sinophone, et ainsi le besoin d’une compréhension plus inclusive de ceux qui sont au final amenés à être les indigènes d’un territoire.

En tant que personne non-occidentale, l’auteur de cet article est conscient des risques que soulève une contribution de l’extérieur à un anthropologique « eurocentrisme » ou « occidentalocentrisme ». Parler d’une contribution à un « eurocentrisme » concerne ce présent article dans la mesure où il est ici question de discuter dans une langue occidentale de l’appropriation non-occidentale d’un concept occidental, et cela dans le but d’apporter une contribution à la science basiquement occidentale et sa sous-discipline que sont l’anthropologie et l’anthropologie visuelle. Ceci étant, l’auteur soutient humblement que les formes que peuvent prendre « l’eurocentrisme » ne seront ici ni défendues ni défiées, mais prendrons plutôt simplement part au sujet de la discussion. Ce qui semble également important de relever à propos des controverses que peut engendrer « l’eurocentrisme » est le fait que ce concept soit bien souvent et ironiquement, directement ou indirectement, volontairement ou involontairement soutenu par les critiques qui justement essaie de la nier - c’est le cas de l’auteur qui, se sentant naturellement incliné à préserver un certain « sinocentrisme », se retrouve par là même à soutenir en retour le concept « d’eurocentrisme » qui constitue sa contrepartie. Ce sinocentrisme de l’auteur s’étend quand on le considère dans un contexte est-asiatique à un « oriens-extremo-centrisme » et se réduit en prenant compte les origines cantonaises de l’auteur à un « cantocentrisme ». Ce type d’involontaire contribution à la dichotomie entre un “eurocentrisme” et un “non-eurocentrisme” ne sera dans cet article de nouveau ni critiqué ni défendu, il fait purement et simplement partie des pêchers académiques inévitablement commis quand un anthropologue est-asiatique discute d’anthropologie.

La sino-appropriation « d’indigène » et l’anthropologie visuelle

Les différences sémantiques dans l’utilisation du mot indigène d’origine gréco-latine sont apparues à l’auteur autant lors de conversations quotidiennes dans un village wallon en Belgique que lors d’expériences personnelles au sein d’un contexte académique. Que ce soit en allemand, anglais, français, ou portugais - langues qui constituent les langues européennes de travail de l’auteur -, ces différences impliquent plusieurs nuances coloniales, et cela même si la traduction du mot indigène est considérée par certains comme pouvant être sans modification de sens utilisée entre les langues européennes sous leurs traductions respectives. Les différentes traductions du mot ne transmettent néanmoins pas les mêmes nuances ni les mêmes significations, les différences de nuances et de significations sont particulièrement notables quand on considère son utilisation dans les langues des pays européens avec peu, voir aucun passé colonial. Une comparaison entre le mot « indigène » dans les quatre langues germaniques considérées communément proches que sont le danois (« oprindelige », voir par exemple Sörlin 2016; et encore « urbefolkning » et « urfolk », voir par exemple Hornscheidt 2011), le néerlandais (« inboorling », « inheemse » ou « inlandse »; voir par exemple Doran 1987 et van Till 2011) - deux langues dont les pays respectifs ont eu un passé colonial important -, le suédois (« ursprungsfolk ») et le norvégien (« urbefolkning » et « urinnvånere » voir par exemple Jentoft, et al. 2001) - dont les pays enregistrent un passé colonial moindre -, met en lumière l’emploi respectif de mots d’origine germanique propre à chaque langue pour signifier l’indigène, et ce avec des multiples nuances. Autant le passé colonial de ces pays que les situations internes à chaque pays transparaissent dans la signification de ces différents mots. En ce qui concerne les langues slaves où l’on trouve par exemple le mot russe (« коренной », voir Rohr 2011), le mot polonais (« tubylczy », voir Dziebel 2005; Posern-Zielinski 2010), le mot tchèque (« domorodec », voir Soukup 1996) ou encore le mot slovène (« domorodec » ou « staroselski », voir Slovenian Academy of Sciences and Arts 2015), il est intéressant de comparer le cas si particulier de la Russie et de son passé expansionniste dans le cadre de l’Union-soviétique avec d’autre pays de l’Europe de l’Est. Les pays de l’Europe de l’Est qui n’ont été académiquement libérés que récemment montrent de grandes variations dans la signification et l’utilisation du mot indigène. Quand on sort de l’Europe de l’Est, des langues d’autres familles comme le finnois (voir Eriksen et al. 2018) ou le lituanien (voir Bielskienė 2016) constituent, par exemple, des cas intéressants de recherche. Enfin, comme dernier exemple et pour expliquer le besoin de l’auteur de mettre le mot « eurocentrisme » entre guillemets dans cet article, on trouve en azerbaïdjanais - quand on ne prend pas compte des mots d’origine greco-latine - un mot turcique qui signifie uniquement les locaux : « yerli » (voir par exemple Ilcan 2002). C’est eût égard aux différences de signification et de nuances du mot indigène entre les langues parlées en Europe que, la nuance qu’apporte les guillemets semble nécessaire pour souligner l’ambiguïté inhérente au terme « eurocentrisme ».

Qu’il existe de telles différences entre des langues européennes qui peuvent pourtant paraître - et particulièrement de point de vue d’un asiatique - si proches, ne peut qu’attirer l’attention sur de possibles et plus grandes différences parmi les langues qui se sont dans un second temps approprié de l’Europe ce concept d’indigène. Dans les langues de l’Asie de l’Est, et plus précisément dans les langues du monde confucianiste, le mot indigène se retrouve, au grès des territoires, traduit de manières très différentes suivant les circonstances historiques et politiques. Ces différences de traductions sont d’ailleurs observables quand on se cantonne à l’exemple du chinois, ou plus précisément du mandarin. Les quatre territoires de la Chine, de Taïwan, de Hong-Kong et de Macao possèdent également leurs propres spécificités qui constituent l’objet de recherche de cet article. Les documents officiels des Nations unies en mandarin - la République populaire de Chine étant membre des Nations unies - présentent une traduction du mot indigène assez discutable : « 土著 » (t’ou tchou). A Taïwan - constitutionnellement encore appelé République de Chine et qui n’est plus membre des Nations unies depuis 1971 -, le terme « 原住民 » (yuan tchou mïn) réapproprié du japonais, la langue des leurs anciens colonisateurs, n’est utilisé que depuis les années 90 pour désigner juridiquement les indigènes sur le territoire. Ce même terme du japonais est aussi officiellement utilisé pour la traduction du terme « autochtone » dans la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, substituant ainsi un terme propre à la traduction chinoise officielle - ce que nous analyserons plus en profondeur dans la suite de cette article. Ce terme emprunté du Japon - qui fût lui-même adopté de l’occident par ce pays – et utilisé par l’administration taïwanaise dans ses communiqués ne renseigne aucune traduction fixe en français. En ce qui concerne Hong-Kong, ancienne colonie de la Couronne britannique et aujourd’hui région administrative spéciale chinoise, qui attire habituellement relativement moins d’attention, la situation est assez curieuse. Quand on compare Hong-Kong avec les cas les plus classiques de l’anthropologie occidentale on constate une particularité : les indigènes de Hong-Kong étant aussi d’origine chinoise, ce qui les différencie du reste de la population réside dans le fait qu’ils habitent le territoire depuis plus longtemps. Au lieu de se retrouver dans une relation de pouvoir asymétrique au regard du reste des habitants, ils profitent au contraire d’un certain nombre d’avantages sur les autres hongkongais et possèdent par ailleurs une certaine influence politique. Parmi les quatre cas cités choisis ici, le cas de Macao reste académiquement le cas le plus obscur, la situation sur ce territoire est néanmoins des plus intéressante : à Macao les habitants d’origine chinoise ont, au long du XXe siècle, de nombreuses fois repensé leur identité et furent même pour un moment également identifiés comme indigènes par l’Empire colonial portugais. Suite à la rétrocession en 1999 la situation changea complètement et les descendants portugais de sang mêlé perdirent le prestige dont ils faisaient l’objet aux yeux de l’administration de Macao. Ils sont depuis toujours appelés par les locaux à l’aide d’un terme cantonais qui fait penser au terme indigène des langues occidentales : « 土生 » (prononcé t’aw sa’ang en cantonais informel). Ce terme cantonais fût également ensuite adopté par le chinois pour les désigner constitutionnellement, cela bien qu’il soit parfois considéré plutôt comme étant « péjoratif » par les chercheurs chinois (voir par exemple Li 2007).

Malgré les circonstances de sa création et le « péché colonialiste » que l’anthropologie a commis, au moins « one version of anthropology has », selon les mots de Christopher Pinney (2011), « closely, and critically, scrutinized its colonial past, and one version of anthropology has subjected itself to ethno-political self-critique more trenchantly, perhaps, than any other practice in the social sciences and humanities. » L’anthropologie visuelle que la Chine et Taïwan se sont relativement récemment appropriée offre un moyen d’approche pertinent de ce sujet compliqué qu’est l’identification et la représentation des peuples indigènes. Le nom de l’anthropologie visuelle fût en soi à plusieurs reprises traduit en chinois. D’une des premières traductions « 视人类学 » en caractères simplifiés (prononcés ying che jen leï sïue en mandarin) en Chine, nous sommes passés à la traduction plus générale de « 視覺人類學 » en caractères traditionnels ou « 视觉人类学 » en caractères simplifiés (prononcés che tsïue jen leï sïue en mandarin ou si gok yan loï h’ok en cantonais). Cette dernière traduction est aujourd’hui partagée par la Chine, Taïwan, Hong-Kong et Macao, la première reste par contre toujours parallèlement utilisée en Chine (voir Deng et Liu 2005 ou Wang Hailong 2007). Ces traductions reflètent bien la perception des anthropologues sinophones depuis le début du processus de « sinisation » de l’anthropologie visuelle et donnent également des indices sur la manière dont cette discipline est comprise et développée par ces mêmes anthropologues. Par exemple, « 視覺 » (che tsïue en mandarin ou si gok en cantonais), littéralement « visuelle-perception », semble être une traduction plus littérale, alors que « » (ying che) contient davantage l’idée d’une anthropologie des médias visuels - « » étant une sorte d’abréviation chinoise qui signifie « le cinéma et la télévision » -, c’est-à-dire autant la production de films anthropologiques que de films de la Science de l’homme. De nouveau, tant « 視覺 » (Arakawa 2002; Takano 2004) que « 人類學 » sont les résultats d’appropriations japonaises de concepts européens, respectivement « vision » et « anthropologie », tandis que « » est une pure invention venant du chinois de Chine.

Le média du film fût employé par l’anthropologue chinois Shun-sheng Ling (1901-1978) dans les années 1930 - anthropologue que l’on compte d’ailleurs parmi les élèves de Marcel Mauss -, ainsi que par Yih-Fu Ruey (1898-1991) qui travailla en coopération avec le photographe et caméraman Yung Shih-heng (aussi romanisé Yong Shi-Heng selon le système « pinyin ») pour son travail de terrain sur les cultures « exotiques » des peuples en bordure de la République de Chine à l’époque (Weitsy Wang 2001). Autant la Chine que Taïwan se revendiquent aujourd’hui de l’héritage de ces deux anthropologues. Des suites de la guerre civile entre les communistes et les nationalistes (aussi connus sous le nom de Kuomintang) et de la victoire des communistes, le statut de la Chine comme pays fermé à l’étranger empêcha les chercheurs occidentaux de mener librement leurs recherches dans le pays, et ce malgré l’intérêt qu’ils aient pu avoir pour lui à l’époque (DeBernardi, 2011). L’anthropologie considérée alors par le Parti communiste chinois comme une science bourgeoise (Bosco, 2004) n’a pu s’y développer qu’à partir de la réforme économique chinoise. En comparaison, l’anthropologie était à la même époque utilisée à Taïwan, Hong-Kong et Macao alors colonies pour comprendre et donc contrôler « l’autre exotique ». Taïwan fût, malgré la dictature nationaliste qui suivit la colonisation japonaise, accessible aux chercheurs occidentaux. Cette accessibilité fût d’une certaine façon le fruit des relations diplomatiques que Taïwan entretint avec l’occident jusqu’à ce que la plupart de ces pays – et de ceux dans le monde d’ailleurs – finissent pas reconnaître la République populaire de Chine comme la seule et unique légitime Chine (voir par exemple Huang 2011) et perdirent de ce fait la possibilité de faire perdurer leurs relations privilégiées avec Taïwan. Dans les décennies 1960 et 1970, les turbulences de la Révolution culturelle affectèrent profondément non seulement la Chine, mais à un degré différent également Hong-Kong et Macao. Taïwan de son côté se trouvait à la même époque toujours sous une dictature de « loi martiale », tandis qu’opérait sur son territoire une sorte de renaissance culturelle politisée en réponse et pour contrebalancer la Révolution culturelle chinoise. Aujourd’hui, autant la Chine, Taïwan que Hong-Kong créèrent leurs propres départements d’anthropologie - ce que Ginsbrug (2002: 261) considèrera par ailleurs être un point critique pour la formation du film ethnographique comme un genre en soi.

Quatre cas différents

Le cas de la Chine

La relation que la Chine entretient avec les indigènes sur son territoire est particulièrement complexe et semble devoir être expliquée au préalable. La Chine a, bien qu’elle démente que le pays ait de quelconques problèmes en ce qui concerne ses indigènes, signé la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones - « indigenous » dans la version anglaise - de 2007 qui relate des droits octroyés aux indigènes (voir Tilt 2014). La Chine refuse d’ailleurs tout cours l’idée indigènes pour désigner de quelconque peuples sur son territoire, préférant les inclure au nombre de son peuple sous la nomination de « minorités ethniques ». Définir ce qui diffère une minorité ethnique d’un peuple indigène ne constitue pas le but de cet article, néanmoins la possibilité d’étiqueter comme indigènes les minorités ethniques en Chine pourrait être en soi un objet de controverse pour la République populaire, et cela surtout quand l’on se représente toutes les conséquences politiques imaginables qu’une telle nomination entrainent pour ces peuples. Le but ici n’est pas non plus d’offrir une réponse à la question de savoir de qui de l’académie occidentale qui insiste sur l’existence de peuples indigènes en Chine ou de l’état chinois qui persiste à ne parler que de « minorités ethniques » a raison, mais plutôt de jeter un rapide coup d’oeil aux enjeux que soulève en général l’utilisation de ce mot. L’emploi de ce mot peut de cet fait paraître très obscur aux étrangers. Saisir le sens des différentes utilisations de ce mot semble également utile pour comprendre les raisons pour lesquelles un tel concept occidental peut être compris si différemment à l’autre bout du monde. De plus, le fait que la Chine se soit approprié la discipline occidentale qu’est l’anthropologie comme instrument au service de l’état questionne également la réelle position de ces peuples minoritaires au sein du pays.

Après leur prise de pouvoir en 1949, les communistes chinois en vinrent à désigner 56 « peuples frères », ou « nationalités fraternelles » - selon la traduction de la propagande communiste dans les années 1950 (voir Chou 1950) - parmi lesquels l’on retrouve le dominant peuple des Hans au côté des 55 minorités ethniques sous le signe « d’une grande famille » (voir Gros 2001). Par cette démarche, les communistes se distinguèrent diamétralement de « l’Union des cinq races » que les nationalistes, prédécesseurs des communistes, avaient instaurée (voir Wang Ke 2015). Conscient de la complexité historique des conflits en bordure du pays, les autorités populaires validèrent l’idée de construire une identité nationale pour ce pays qu’elles désignèrent « historiquement multi-ethnique » qu’est fondamentalement la Chine, la construction de cette identité nationale étant naturellement particulièrement destinée à l’intégration des peuples considérés à l’époque encore non-sinisés. Le médium film fût utilisé dans ce cadre comme instrument pour la construction de cette identité nationale, non pas dans le but de servir uniquement, et selon la propagande chinoise, à « sauver les cultures en voie de distinction », mais également à aider la promotion de l’idée de minorités ethniques en Chine (voir Ma, 2013; Shi, 2010). La décennie qui précéda la Révolution culturelle fût vue en Chine comme une décade d’or pour la production de documentaires académiques sur les différentes sociétés et histoires des minorités ethniques. Un nombre notable des documentaires de cette époque furent produits sous la direction de Yang Guanghai, un cinéaste lui-même Baip (Les Baips sont une des 55 minorités officielles de Chine). Bien qu’il n’ait jamais reçu de formation anthropologique, Yang est considéré comme un des fondateurs du film ethnographique de Chine, et ce malgré que ses documentaires académiques soient selon Cai Jiaqi (2011) inclus dans la catégorie du film ethnographique. En tant qu’ethnologue, Cai (2011) a rencontré Yang lors de la production de son film « 伦春族 » (Ngo louen tch’ouen tsou en mandarin, « Les oroquens », 1963), un des premiers documentaires académiques produits sous la République populaire. Bien que Cai mette l’accent sur le fait que les films de Yang soient les produits de collaboration avec les sujets des films eux-mêmes (Cai, 2011), la critique et réalisatrice taïwanaise de films ethnographiques Weitsy Wang (2001) critique quant à elle le manque “d’observation participante” et le côté fortement sinocentrique (ici à comprendre de la perspective des Hans) des documentaires de Yang.

Une série d’institutions d’enseignement supérieur pour l’étude des cultures des minorités ethniques fût fondée en Chine depuis la proclamation de la République populaire : les « 民族大学 » (mïn tsou ta siue en mandarin, littéralement mïn-tsou-universités). « 民族 » (mïn-tsou ou, selon le système « pinyin », minzu) est un mot dont la complexité est considérable en chinois (voir Wang Ke 2015). Comme c’est le cas pour la plupart du vocabulaire du mandarin moderne, il s’agit d’un mot composé de deux caractère provenant directement du chinois classique : « » (mïn, les gens ordinaires) et « » (tsou, les groupes, avec une nuance de clans). Ce mot composé du mandarin moderne est à l’origine étymologiquement un emprunt qui se fit via la complexe appropriation sino-japonaise simultanée de plusieurs concepts occidentaux comme « nation », « peuple » et « race » (voir Müller-Saini 2010). Ce mot composé « 民族 » est employé dans le contexte de la créations de ces institutions pour designer les minorités ethniques en Chine. La Chine a aujourd’hui tendance à romaniser le mot « 民族 » (minzu) dans le nom officiel des universités pour leur traduction en anglais, remplaçant ainsi l’ancienne traduction anglaise « nationalities ». Les institutions « 民族大学 » furent fondées de part et d’autre du pays et formèrent pendant plusieurs décennies des chercheurs autant ethnologues, folkloristes que documentaristes eux-mêmes de minorité ethnique ou faisant de la recherche sur une d’entre elles. Pour nommer un exemple, l’ethnologue et linguiste d’origine kirghize Muhammed Hu Zhenhua, professeur retraité de l’Université centrale des minorités de Pékin (officiellement « Minzu University of China » en anglais), a produit en 1983 une série de documentaires en dix épisodes sur le peuple kirghiz de Chine.

L’Institut d’anthropologie visuelle de l’Asie de l’Est fondé en 1991 à l’Université de Yunnan, gagna dans les années 90 le soutien académique de l’Institut pour le film scientifique de Gœttinguen ainsi que le parrainage de la fondation Volkswagen de Hanovre en 1999. Un nombre croissant de réalisateurs de films ethnographiques reçurent par la suite également une formation formelle d’anthropologue visuel, que ce soit d’universités occidentales ou d’institutions locales où la sous-discipline est enseignée dans sa version sinisée (voir Wang Haifei 2008). Deux remarquables exemples du développement de cette sous-discipline en Chine sont l’apparition du Festival visuel multiculturel de Yunnan en 2003 ainsi que l’oeuvre d’anthropologie visuelle Tiger Day (2002) de Zhuang Kongshao qui a, dans le cadre d’une campagne locale contre la drogue, promut avec succès les rituels serment des peuples Yi. Ces exemple ne sont que des cas parmi tant d’autres, nommés ici dans le but de permettre au lecteur de se faire une impression de l’évolution de la scène anthropologie visuelle chinoise. Dix ans après sa fondation en 2013, le festival, qui fût à la base du film ethnographique et devint avec le temps plutôt un festival pour le film indépendant, ferma des suite de raisons peu claires. L’Institut d’anthropologie visuelle de l’Asie de l’Est n’existe aujourd’hui également plus, selon le site officiel de l’université il aurait été remplacé par un institut unipersonnel d’anthropologie pour les médias (http://www.msxy.ynu.edu.cn/jgjsz/mtrlxyjs.htm).

En Chine, les Cuenghs (Zhuang en mandarin selon le système « pinyin »), les Huïs (aussi considéré de manière contestable comme les musulmans chinois), les Mongols (de Mongolie Intérieure), les Ouïghours, les Tibétains, ainsi qu’un grand nombre d’autre minorités ethniques sont constitutionnellement auto-gouvernés dans leurs propres régions. Ces minorités ethniques furent identifiées dans le cadre de l’identification et de la catégorisation des peuples minoritaires, identification et catégorisation elles-mêmes inspirées du modèle soviétique. Néanmoins, le pouvoir politique - ainsi que les médias officiels malgré que ces médias soient dans la langue de ces minorités - reste dans les faits dans les mains du gouvernement central, que ce pouvoir soit directement ou indirectement exercé par Pékin. En tenant compte des différents travaux de certains chercheurs dont l’objet d’étude est l’aspiration de ces peuples indigènes de Chine à l’expression de soi (voir Michaels 1985; Turner 1992; Ginsburg 2002; et Wood 2008), l’auteur défend le point de vue qu’il est important de ne pas perdre de vue le lourd contrôle auquel les minorités ethniques sont assujetties ainsi que la notable censure subie par les médias ethniques – en incluant autant le film anthropologique que le cinéma ethnique. Il est également important de relever que l’intégralité des sous-groupes ethniques des Hans devraient, selon l’humble opinion de l’auteur, également jouir de ce droit à l’expression de soi au-travers de médias visuels. L’existence de médias visuels propres à ces peuples pourrait par exemple jouer un rôle majeur dans la préservation de leurs langues reconnues officiellement comme dialectes. Il est indéniable que les peuples minoritaires vivent une situation extrêmement critique, cependant les médias ethniques produits depuis la fondation de la République populaire constituent un exemple intéressant pour comprendre les efforts de la Chine en ce qui concerne l’insertion de ces peuples et leur participation à la construction d’une identité nationale pour le pays. Comment ces peuples sont, dans un tel système politique, précisément étiquetés par la Chine ne constitue pas le sujet de cet article, la priorité est ici plutôt de gagner une vue plus détaillée des différents citoyens de la République populaire qui peuvent être considérés comme se trouvant dans une position de subalternes. Dans un pays où autant la catégorisation que l’étiquetage de toutes choses est politisée et où l’utilisation de langues autre que le mandarin standard n’est pas encouragée, il est remarquable de mentionner que ces langues sont dans un même temps curieusement politiquement promues. Des langues comme le cantonais et le hokkien - toutes les deux officiellement dialectes chinois - dont les intérêts politiques vis à vis de Taïwan, Hong-Kong et Macao sont grands possèdent des chaines de télévision si pas entièrement au moins en majorité dans leurs langues. Des sous-dialects du mandarin qui semblent pour leur part politiquement moins intéressantes ne possèdent quant à eux que de rarissimes programmes de télévision ou de radio dans leurs dialectes. A Taïwan, cas auquel nous arrivons, la politique linguistique semble également largement politisée et cela peut sembler aussi assez curieux. Autant les hakkas que les foukiénois taïwanais - sous-groupes des Hans – possèdent à Taiwan une télévisions dans leur propre langue : respectivement la Hakka TV et le Taiwan Public Television Service (PTS) avec une chaîne en taïwanais. Ces télévisions comptent d’ailleurs parmi les membres du Réseau mondial des télévisions indigènes (WITBN). Il est encore plus curieux de remarquer que, et à la différence de la Chine, toutes les langues « originellement existantes » à Taïwan (traduit officiellement en anglais « native languages » par le Ministère taïwanais de la Culture) - parmi lesquelles on retrouve le hakka, le hokkien taïwanais et d’autres langues indigènes - sont depuis 2008 officiellement considérées « langues nationales » à Taiwan (traduction du Ministère taïwanais des Affaires étrangères).

Le cas de Taïwan

En ce qui concerne l’étiquetage des autres, la politique à Taïwan diffère fondamentalement de celle de la Chine : Taïwan compte officiellement quatorze « 原住民 » (caractères à prononcer yuan tchou mïn en mandarin ou gen-ju-min en japonais, officiellement traduit en anglais par « indigenous people » et signifiant littéralement en mandarin « habitants originaires »). Ces 14 groupes « d’habitants originaires » ainsi que d’autres groupes d’indigènes, dont la désignation officielle d’indigènes n’a pas encore été reconnue, sont considérés par contre par la République populaire de Chine comme constituants une des 55 « minorités ethniques » chinoises et sont également appelée « Peuple des hautes montagnes ». Le fait que la République populaire ne reconnaisse l’existence d’indigènes ni en Chine ni sur le territoire de Taïwan, aide à comprendre pourquoi le terme « d’habitants originaires » (原住民) employé à Taïwan n’est pas reconnu officiellement par elle. Du fait que la Chine ne reconnaisse dans son discours officiel pas l’existence d’indigènes sur les territoires qui la concerne, et qu’elle refuse donc d’utiliser le terme utilisé officiellement à Taïwan, on ne trouve dans le chinois de la Chine continentale jusqu’alors pas de mot officiel pour désigner ce concept. Il existe en chinois un terme très ancien pour désigner le concept d’ indigène : le terme « 土著 » (t’ou tchou en mandarin). C’est à l’aide de ce mot que le concept d’indigène apparaît dans la traduction officielle chinoise de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Le mot « 土著 » provient des langues confucianistes, il est composé d’un premier caractère signifiant la « terre » en chinois classique et d’un deuxième, un mot-outil, signifiant « sur » ou « attaché à » ; ce que l’on pourrait traduire littéralement par « les gens sur/attachés à la terre ». Au sein d’une culture qui a traditionnelle fortement tendance à catégoriser hiérarchiquement les choses, ce mot « 土著 » possède depuis le chinois classique une teinte assez hiérarchique. En effet, il désigne les peuples non-sinisés ou simplement les peuples natifs avec un mot qui n’est pas libre d’un certain sens péjoratif : le mot « terre ». Les Japonais se sont, à l’époque de la modernisation de leur pays, par ailleurs réapproprié ce mot pour désigner les Indiens d’Amérique. Ce terme n’a pas seulement jusqu’à aujourd’hui gardé une certaine connotation péjorative, il semble également et comme mentionné plus haut quelque peu démodé et relativement peu utilisé. Pour un pays qui critique largement l’impérialisme occidentale et colonial du passé, le fait que, de par son refus de reconnaître l’existence d’indigènes sur ses terres, il balaye les enjeux que peut soulever ce terme semble déroutant. Le mot « gens sur/attachés à la terre » (土著) semble de prime à bord pouvoir interpréter très pertinemment le passé de souffrance et d’oppression vécus par les peuples sous les colonisations occidentales, il ne fait cependant pas l’unanimité au sein des peuples de langue chinoise. Si on le trouve encore aujourd’hui dans la traduction officielle des Nations unies c’est que cette traduction officielle est autant pratiquement que politiquement difficile à modifier. En insistant dans l’utilisation de sa propre version du terme d’indigènes (原住民, littéralement « habitants originaires » en chinois) Taïwan refuse précisément cette traduction chinoise (土著) des Nations Unies, et cet acte représente bien la différence fondamentale des positions politiques des deux territoires que sont la Chine et Taïwan. A Hong-Kong un terme qui peut sembler similaire est utilisé et reconnu par la Chine : 原居民 (littéralement « résidents originaires » en cantonais) pour traduire « habitants indigènes ». Ce terme ne fait pas de l’objet de polémique pour la Chine étant qu’il traduit une nuance fondamentalement différente. En effet, dans ce terme les indigènes hongkongais ne seraient que les résidents d’origine Han qui habitent originellement sur le territoire de Hong-Kong alors que les « habitants originaires » taïwanais sont selon la perspective taïwanaise originaires du territoire taïwanais.

La manière dont les peuples indigènes sont identifiés à Taiwan est le fruit de l’héritage du régime colonial japonais (Bauki Angaw 2001) et ce en quoi Taïwan diffère particulièrement de la Chine réside dans le fait que Taïwan aie identifié et reconnu officiellement ses peuples indigènes et les droits qu’ils leur reviennent, ce que bon nombre de pays occidentaux ont d’ailleurs également fait. Là où la Chine met l’accent sur le fait que, et selon ses propres mots, le « pays est depuis des temps anciens un pays ethniquement multiple », Taïwan reconnait pour sa part l’historique asymétrie qui peut exister entre les peuples indigènes et le reste de la population. Afin de saisir correctement les positions des deux territoires, il est important de noter les différences historiques fondamentales qui différencient la Chine et Taïwan : si l’on considère strictement les deux territoires chinois et taïwanais dans leurs frontières politiques, la Chine apparaît comme un pays dont l’histoire enregistre de constants contacts et échanges entre les Hans et les non-Hans (voir Müller-Saini 2010; Sanjuan 2000) alors que les Hans ont émigrés à Taiwan depuis des siècles. Comme mentionné plus haut, le Parti communiste chinois a instauré une politique régionale d’autonomie ethnique en Chine, les peuples indigènes de Taïwan (parfois également traduits « aborigènes » ou « autochtones » en français par le Ministère taïwanais des Affaires étrangères) se sont quant à eux battus afin d’acquérir le droit à l’autodétermination. Leurs efforts se traduisirent par une série d’événements nommés les « mouvements des habitants originaires » qui débutèrent dans les années 80 et durèrent jusqu’à l’obtention de la reconnaissance constitutionnelle de leur indigénité. Actuellement, et bien que la création des régions autonomes soit toujours en jeu, on a déjà au moins vu la formation de cantons et districts indigènes montagnards et avec cela la possibilité constitutionnelle de leur auto-gouvernance. Une télévision pour les peuples indigènes a également vu le jour en 2005. La Taïwan Indigenous Television (TITV), la Hakka TV et la PTS taïwanaise en tant que membres asiatiques du WITBN, diffusent chacune des programmes autant en mandarin que dans les langues indigènes et Taïwan peut en cela être considéré comme une référence en ce qui concerne la représentation de l’idée d’indigénité dans le monde sinophone. Comme mentionné plus haut, le fait que la Hakka TV et la PTS - au même titre que la TITV - soient membres du WITBN, semble encourageant pour la préservation de la variété linguistique et culturelle des sous-groupes ethniques des Hans. Savoir si de tels sous-groupes comme les Hakkas et les Hokkiens dont la majorité ethnique est absolument dominante aient ou non à être identifiés indigènes reste discutable et si ce point ne sera pas discuté plus profondément dans le cadre de cet article, il semble être un point intéressant à mentionner. Il est également nécessaire de noter que, en ce qui concerne les études sur l’indigène, rester attentifs à ne pas focaliser son attention uniquement sur les peuples identifiés ou se revendiquant eux-mêmes comme indigènes est important. Un grand nombre de peuples qui se retrouvent inclus dans les majorités ont tout aussi longuement été culturellement opprimés au sein de leurs états sans pour autant avoir reçu un degré d’attention élevé au niveau international.

Ainsi que Ginsburg (2002: 264) le note, « native groups all over the world have been reappropriating colonial photography and films for purposes of cultural revival and political reclamation ». Le réalisateur kavalan, Bauki Angaw (2001), considère le patrimoine visuel laissé autant par les colonisateurs japonais que la dictature nationaliste comme faisant partie intégrante du « cinéma indigène » taïwanais, et cela bien qu’il critique également sévèrement ces films qui ont ces dernières dizaines d’années selon lui échoué à représenter justement ces indigènes. L’anthropologue et réalisatrice d’origine chinoise Hu Tai-li (2013) a tendance à inclure les « indigenous-themed documentaries made by directors of both indigenous and non-indigenous descent » à la catégorie des « documentaires des peuples indigènes ». Bauki Angaw fait l’éloge du comportement de Hu et énumère ses oeuvres comme faisant partir de l’héritage visuel indigène. Bien qu’aucun d’eux n’utilise le terme de « médias culturels », autant les réalisateurs taïwanais de films ethnographiques que ceux de documentaires vivant dans une société post-coloniale et post-dictatoriale - qu’ils soient indigènes ou non - se rejoignent dans le sens que leurs aspirations à l’expression de soi ne se différencient pas uniquement des idées du groupe ethniques dominants que sont les Hans, mais tendent également à diriger leurs efforts dans la construction d’une identité nationale qui soit différente de celle de la Chine. Terence Turner (1992: 6) met en évidence que les « cultural media [autant le cinéma ethnographique que les médias indigènes] form part of a social project of communication of cultural knowledge for political and social ends, such as overcoming prejudice through inter-cultural understanding, or reproducing ethnic identity and political cohesion ». Aujourd’hui, Taïwan a produit des médias culturels relativement matures, néanmoins l’industrie du film indigène de Taïwan semble avoir encore du chemin à parcourir. La question de savoir quels sont les films qui peuvent être considérés comme indigènes semble également intéressante. Les deux exemples que sont la grande production de John Woo Seediq Bale (2011) - qui mettait en scène les héroïques seediqs contre les envahisseurs japonais - et le jeune film de fiction Finding Sayun de Laha Mebow (2011) - qui fait référence au Cloche de Sayon (1943) réalisé par Shimizu Hiroshi dans les dernières années coloniales – illustrent particulièrement bien cette question. Quelle que soit la situation actuelle de l’industrie du film indigène sur le territoire, Taïwan reste un exemple de référence en ce qui concerne la question de la sauvegarde de la diversité culturelle de ces sous-groupes qui, du fait qu’ils soient oppressés par une hégémonie culturelle et politique, se retrouvent dans une situation comparable à celle des peuples indigènes : à Taïwan, non seulement les peuples indigènes, mais également les taïwanais d’origine hakka et foukiénoise trouvent les conditions fondamentales nécessaires à la conservation de leur propre culture et de leurs propres spécificités.

Le cas de Hong-Kong et de Macao

Autant l’ancienne colonie de Hong-Kong que celle de Macao sont aujourd’hui régies selon le principe « d’un pays deux systèmes » - l’ancienne colonie britannique et l’ancienne enclave portugaise sont actuellement des régions à « haute autonomie » au sein de la République Populaire de Chine. Hong-Kong, en tant que métropole et centre financier asiatique hautement dynamique, possède une industrie du cinéma importante à propos de laquelle Roy Armes (1987) disait déjà à la fin des années 1980 que la colonie d’alors « has built a flourishing export industry, supplying films to Chinese communities throughout the world and even-for a brief time in the 1970s-breaking into Western domestic markets ». L’administration de Macao, au contraire, n’a que récemment commencé à financer systématiquement la production de films, et cela dans le but de créer une industrie locale de cinéma. Constitutionnellement, autant Hong-Kong que Macao ont leurs propres groupes d’indigènes : respectivement les « habitants indigènes » hongkongais et, bien que cette nomination soit contestée, les « portugais natifs » de Macao. Les premiers sont un groupe ethnique chinois qui, malgré leur grande activité pour la sauvegarde de leurs droits et coutumes traditionnelles héritées de la Chine ancienne, partage en terme d’identité beaucoup avec le reste de la population ; les autres forment une communauté d’anciens colons de sang mixte a l’influence éminente, considérés comme faisant partie du peuple de Macao bien qu’ils restent à jamais différents compte-tenu de leur héritage portugais.

L’étiquetage « d’habitants indigènes » à Hong-Kong a un rôle davantage symbolique que culturel, cet étiquetage remplit de plus une fonction très précise en ce qu’elle protège les droits accordés par l’administration hongkongaise à ces « habitants indigènes ». Ces droits leur prodiguent un certain statut de « prestige » par rapport au reste de la population hongkongaise : dans une ville à la densité de population si surprenante, les habitants indigènes patrilinéaires se voient par exemple octroyés le droit de construire une maison de trois étages « par vie ». L’obtention d’un tel droit constitue un cas singulier qui est le résultat d’une politique instituée dans des circonstances historiques spécifiques héritées du temps colonial, il fût destiné à protéger les habitants primordiaux d’un territoire sur lequel d’autres se laissent aujourd’hui également désignés comme « locaux ». Il dessine comme le vestige d’une Chine ancienne au sein d’une petite Chine post-coloniale se trouvant elle même en bordure de la grande Chine communiste. Les droits des indigènes furent respectés pour le moins en termes légaux au niveau de la loi par les anciens colonisateurs et sont jusqu’à aujourd’hui encore protégés par la Loi fondamentale de la Région administrative spéciale de Hong-Kong, c’est-à-dire par son document constitutionnel.

Bien que, comme mentionné plus haut, Hong-Kong possède une industrie du cinéma florissante dont le marché s’étend autant sur le territoire hongkongais que à l’étranger, un cinéma à proprement dit indigène reste absent sur le territoire. Les habitants indigènes des Nouveaux Territoires de Hong-Kong ne possèdent pas de médias culturels indigènes qui leur seraient propres. Néanmoins et en ce qui concerne la scène du cinéma et des médias hongkongais pour le grand public, on peut donner ici d’exemple de deux fameuses personnalités indigènes : Chow Yun Fat, un des acteurs sinophones les plus connus mondialement, ainsi que la productrice de documentaires de télévision internationalement connue Joani Tang (1966-2016) sont indigènes. Joani Tang a produit un nombre de documentaires populaires sur des thèmes divers à Hong-Kong, elle a également produit plusieurs documentaires sur la culture chinoise à l’étranger. Pour donner ici l’exemple d’un film indigène réalisé par une indigène, on peut également mentionner Flowing Stories (2014) de la cinéaste Tsang Tsui Shan.

De son côté, et en tant que loi constitutionnelle, la Loi fondamentale de Macao ne mentionne pas directement d’indigènes dans son texte et fait plutôt mention de résidents de sang mêlé à descendance portugaise. Ces résidents « luso-descendants », pour la plupart traditionnellement bilingues, servirent pendant le temps colonial de médiateurs entre les colonisés (ou pour parler de manière plus politiquement correcte, les administrés) et les colonisateurs (les administrateurs). Il est également important de mentionner que les Chinois à Macao furent pendant la première partie du XXe siècle pour un moment désignés juridiquement comme indigènes par le régime colonial portugais, et cela au même titre que tous les autres peuples colonisés par les Portugais. L’inclusion, dans cet article, de ces « descendants portugais » qui servirent de médiateurs coloniaux et firent d’une certaine façon partie de la communauté des colonisateurs peut sembler étonnant, le fait par contre que ces « descendants » soient constitutionnellement référés et identifiés « 土生葡人 » (t’ow sang p’ow ya’n en cantonais formel ou t’ou cheng pou jen en mandarin) - signifiant littéralement « Portugais natifs en terre » - justifie néanmoins leur mention. Les descendants « d’origine portugaise » se nomment eux-mêmes presque exclusivement « macaenses » en portugais et « Macanese » en anglais (littéralement « macanais » en français). Ce terme contient une certaine ambiguïté dans le sens qu’il pourrait également, et selon l’interprétation qu’on en fait, inclure tout le reste de la population de Macao. Il est également intéressant de noter que la Chine refusa dans les années 1980 d’utiliser ce terme en portugais dans le cadre des négociations sur la rétrocession avec le Portugal et de ce qui fût appelé la « question de Macao ». Comme l’article le mentionne plus haut, le mot « terre » en chinois contient une nuance hiérarchique. Malgré que la langue chinoise se soit, depuis le début de la modernisation (ou occidentalisation) de la Chine et particulièrement au fil du dernier siècle, massivement « déhiérarchisée », on peut encore retrouver cette nuance hiérarchique dans l’appellation en cantonais informel de « 土生 » (t’ow sa’ang avec une petite différence de prononciation). Tout ceci devient très curieux quand on considère comment les « Portugais natifs de la terre » de Macao et les « habitants indigènes » de Hong-Kong sont mentionnés de manière similaire dans les lois constitutionnelles respectives des deux territoires.

Les « Portugais natifs de la terre » (土生葡人), ou les « fils de la terre » (土生), comme ils s’identifient assez romantiquement et émotionnellement eux-mêmes en portugais, partagent en effet plusieurs similarités avec ce qui dans les langues européennes est communément appelé les peuples indigènes. Il est intéressant de relever que leur patois (écrit souvent en portugais « patuá », une sorte de créole portugais) soit en danger, et ait même, en partie des suites de la colonisation portugaise, d’ailleurs presque complètement disparu. Le fait que leur taille par rapport à la population complète de Macao ne soit que de cinq pour cent et qu’ils aient eu tendance à se faire siniser depuis la rétrocession en 1999 doit également être noté. Ce qui peut sembler en contradiction avec la définition du terme indigènes dont Linda Tuhiwai Smith (2012: 7) fait allusion - « the descendants of settlers of land over generations or simply through being born in that place » - est le fait que le peuple local d’origine cantonaise à Macao les ait identifiés aussi comme « portugais natifs du sol ». Cette contradiction est probablement dû au fait que les cantonais locaux se sont longtemps et sinocentriquement considérés eux-mêmes comme étant le peuple légitime des lieux et aient nommé les autres les natifs. Bien que les cantonais fussent également natifs - on pourrait même les qualifier de davantage natifs étant qu’ils vivaient sur le territoire avant l’arrivé des Portugais -, cette appellation les désigne plutôt en tant que propriétaires malgré qu’ils aient étés ceux qui se sont fait coloniser. Parmi ces « Portugais natifs » se retrouve un mélange complexe de différentes classes sociales et groupes d’intérêt, et c’est compte tenu de cette multiplicité que l’auteur défend l’idée que l’entièreté de ce groupe culturo-éthique ne devrait pas être considérée comme appartenant exclusivement à l’élite ou encore l’ancienne communauté des colons. Ceci étant, encore une fois, l’étiquette indigènes est loin d’être toujours pertinente et le centre d’attention devrait plutôt être mis sur les gens qui se disent oppressés par une hégémonie culturelle extérieure. Néanmoins, comme les « Portugais natifs » macanais sont culturellement et ethniquement assez différents du reste de la population, ils sont aussi et pour cela davantage conscients par rapport aux « médias culturels ». Sérgio Perez, un réalisateur originaire de ce groupe, produit par exemple des vidéos en portugais créole pour la troupe de théâtre qui participe chaque année au Festival d’art de Macao.

Conclusion

La littérature occidentale de l’anthropologie visuelle concernant les communautés indigènes de par le monde continue de se concentrer sur des problèmes que peuvent constituer les peuples dits indigènes dans les pays de langues européennes. De son côté, et comme le suggère pertinemment Joseph Bosco (2004) anthropologue à l’Université chinoise de Hong-Kong, l’anthropologie asiatique continue de se positionner en périphérie des sciences sociales, domaine largement dominé par les universités euro-américaines et la pensée occidentale. En ce qui concerne l’anthropologie visuelle en général, malgré les différences qui subsistent entre les films ethnographique et les médias culturels indigènes, les frontières entres le film ethnographique, les médias indigènes et les documentaires à contenu ethnographique, ont tendance à devenir de plus en plus floues. Dans le monde sinophone, le cinema ethnographique semble souvent être interchangeable avec le cinéma ethnique, voire même avec le cinéma en général dès qu’il établit un rapport avec les groupes minoritaires, indigènes ou encore même avec tout ce qui peut sembler exotique au sein des propres frontières politiques d’un territoire. En Chine, on observe la tendance à englober les productions cinématographiques des différents territoires sinophones sous un seul « média culturel chinois » (selon les mots de l’auteur), le cinéma ethnique se retrouve également sous cette catégorie aux côtés de toutes autres sortes de productions visuelles. A Taïwan, il semble que les médias culturels indigènes ou des sous-groupes des Hans ont la liberté officielle de développer leurs propres médias culturels. Etant que les indigènes de Hong-Kong partagent dans les faits la culture avec le reste de la population et ne se distinguent que par le fait qu’ils habitent le territoire depuis plus longtemps, on n’enregistre pas d’efforts notables de leur part pour revendiquer leur appartenance au travers de « médias culturels ». Alors que, si l’on suit les théories de l’anthropologie occidentale, l’indigénité des indigènes de Hong-Kong pourrait être remise en question, la situation à Macao est encore davantage particulière et intéressante. En effet, la majorité de la population chinoise à Macao a été considérée pendant un court moment comme indigène, c’est par contre le groupe d’anciens médiateurs entre les portugais et les chinois qui ont aujourd’hui le prestige d’avoir le statut indigènes. Ces indigènes à Macao ne possèdent dans le sens strict du terme pas leur propre industrie de productions visuelles, on observe par contre une constante production filmique qui, dans la plupart des cas, a pour but la préservation de leur culture.

Comme nous avons pu l’observer plus haut, les trois administrations de Chine, Taïwan et Hong-Kong ont chacune leur propre définition et leur manière de se représenter leurs « minorités ethniques », « peuples indigènes » ou « habitants indigènes » respectifs. Leur manière de les nommer en chinois dépend également de chaque territoire et évolue en respectant des termes précis et spécifiques. Les minorités ethniques de Chine sont officiellement désignées comme les « nationalités fraternelles » des Hans, tandis que à Taïwan l’accent est, selon le modèle occidentale inspiré de l’influence japonaise de l’ex-colonie, plutôt mis sur la différences entre les peuples indigènes à la terre et les peuples non-indigènes au territoire. A Hong-Kong, on trouve, selon l’influence à la fois du modèle européen et du modèle chinois, une distinction dans les droits accordés aux « habitants indigènes » des Nouveaux Territoires. A Macao, l’idée d’indigène a disparue depuis l’époque coloniale. Présenter le cas de ces quatre territoires sinophones n’a pour le moins pas pour but d’avancer que certains des différents peuples mentionnés ci-dessus n’aient pas à être identifiés comme indigènes par leur gouvernement respectif, il est bien plutôt de faire écho à Ginsburg (2002) et Wood (2008) en mettant en évidence la complexité des rapports de chaque territoire avec ses natifs. Ces rapports suggèrent globalement une asymétrie dans les relations de pouvoir entre les dominants et les subalternes, que ces derniers soient étiquetés officiellement indigènes par leurs états ou non. Le fait que cet article se soit concentré sur le terme indigènes - que se soit dans les cas où ce terme sert d’auto-labellage ou soit utilisé par certains pour désigner d’autres - peut également sembler ne pas tout à fait convenir aux sociétés sinophones. Si l’auteur a insisté dans cet article sur ce concept étranger d’indigène, c’est justement pour en révélé l’autocentricité. En effet, étant que ce terme occidental et donc son concept étranger ont été importés plus tardivement dans ces pays, il semblerait plus judicieux de porter au sein de ces territoires l’attention sur ceux qui se trouvent de manière plus générale dans une relation d’asymétrique de pouvoir face à leurs états et qui aspirent à trouver un moyen effectif pour se revendiquer et s’exprimer. L’auteur de cet article soutient que c’est pour servir ce but que les médias visuels subalternes devraient être utilisés par ces peuples eux-mêmes, et ce de la manière dont ils le désirent.

Remerciement

Cet article est la version révisée et amélioré d’une recherche jusqu’alors inédite menée en 2013 sous la direction du Docteur Steffen Köhn. Elle fût menée dans le cadre du programme de Master « Visual and Media Anthropology » de l’Université libre de Berlin rendues possibles grâce à une bourse d’études accordée par le gouvernement macanais. Je souhaite également exprimer ma gratitude envers Docteur Stephen Köhn. L’auteur précise qu’il assume toute responsabilité et reconnais comme siennes les idées et points de vues développés dans l’article. Je tenais également à remercier Sharon Olang pour son conseils et son aide dans l’écriture de l’abstrait de cet essai dans sa forme originale en anglais. Dernièrement je souhaiterai remercier ma douce moitié la sinologue Mathilde Denison Cheong pour le soutient moral qu’elle m’a apporté pendant la rédaction de l’article ainsi que pour ses conseils indispensables.

Référence

Bielskienė, Jolanta, 2016. « Solidarumas ir Politinė Emancipacija Pasipriešinimo Kolonijiniam Imperializmui Perspektyvoje : Bolivijos Atvejis ». Tiltai, 2016, 2, 97–114.

Chou, En-Laï, 1950. Première année de victoire de la China nouvelle : Luttons pour la consolidation et le développement de la victoire du peuple chinois. Pékin, Éditions en langues étrangères.

Deng, Weirong et Liu Jing, 2005. 影视人类学:思想与实验 (titre en anglais : Visual Anthropology: Ideological and Experimental). Pékin, Maison d’édition des minorités.

Doran, Christine, 1987. Indonesian Politics: A Reader. Townsville, Centre for South-east Asian Politics, James Cook University of North Queensland.

Dziebel, German Valentinovich, 2005. Playing and nothing: European appropriations of native American cultures in the late 20th century. Stanford University.

Eriksen, Thomas Hylland, Sanna Valkonen et Jarno Valkonen (dir.), 2018. Knowing from the Indigenous North: Sámi Approaches to History, Politics and Belonging. Routledge.

Gros, Stéphane, 2001. « Du politique au pittoresque en Chine : À propos des Dulong, nationalité minoritaire du Yunnan ». Ateliers d’anthropologie, n° 24 (août 2001) : 28-68.

Hornscheidt, Antje Lann, 2011. « Postcolonial Continuities in Danish Monolingual Dictionaries: Towards a Critical Postcolonial Linguistics ». In Eric A. Anchimbe et Stephen A. Mforteh (dir.), Postcolonial Linguistic Voices: Identity Choices and Representations, p. 265-298. Berlin et Boston, De Gruyter.

Jentoft, Svein, Henry Minde et Ragnar Nilsen, 2003. Indigenous Peoples: Resource Management and Global Rights. Circumpolar Universities Cooperation Conference (7th, 2001, University of Lapland).

Li, Changsen, 2007. 明清时期澳门土生族群的形成发展与变迁 [La formation, le développement et l’évolution du groupe ethnique des luso-descendants de Macao pendant les dynasties Ming et Tsing]. Pékin, Zhonghua Book Company.

Ilcan, Suzan, 2002. Longing in Belonging: The Cultural Politics of Settlement. Westport (Connecticut) et Londres, Praeger.

Müller-Saini, Gotelind, 2010. « 近代中国和人种概念——“全球本土化问题的历史探讨 » (titre traduit par l’auteur en anglais : « Modern China and the Concept of ‹ Race › : a Historical Investigation into the Problems of Globalisation ». In 新史学 (titre traduit par l’auteur : New History), no. 4, p.155-178. Pékin, Zhonghua Book Company.

Pinney, Christopher 2011. Photography and Anthropology. Londres, Reaktion Books.

Posern-Zielinski, Aleksander, 2010. « Globalizacja w ‘czwartym świecie’ a nowe ruchy tubylcze » (titre en anglais: « Globalisation in the “Fourth World” and New Indigenous Movements »). Lud, 94 : 25-46.

Research Centre of the Slovenian Academy of Sciences and Arts, « Terminološka svetovalnica ». Consulté le 15 Janvier 2020. https://isjfr.zrc-sazu.si/sl/terminologisce/svetovanje/domorodna-ljudstva#v.

Rohr, Johannes, 2011. « Anpassung und Selbstbehauptung: Die indigenen Völker in Russlands Hohem Norden ». Osteuropa, Vol. 61, No. 2/3 : 387-416.

Sanjuan, Thierry, 2000. « Les marges culturelles du territoire chinois ». Géographie et cultures, n°34 : 2000.

Sörlin, Sverker (dir.), 2016. Science, Geopolitics and Culture in the Polar Region: Norden Beyond Borders. Routledge.

Soukup, Václav, 1996. Dějiny sociální a kulturní antropologie. Prague: Université Charles.

Takano, Shigeo, 2004. « 『哲学字彙』の和製漢語--その語基の生成法・造語法 » (titre en anglais: Word Stems in ‹ Tetsugaku-ji ›: Word Stems of the Japanese-made Chinese Words and the Method of Word Creation and Formation). Bulletin of the Institute of Humanities (37), 87-108: 2004-03. Yokohama, Kanagawa University.

Van Till, Margreet, 2011. Batavia bij Nacht: Bloei en ondergang van het Indonesisch roverswezen in Batavia en de Ommelanden, 1869-194 [Banditry in West Java 1869-1942]. Traduit par David McKay et Beverley Jackson. Singapour, NUS Press.

Tilt, Bryan, 2014. Dams and Development in China: The Moral Economy of Water and Power. New York: Columbia University Press.

Wang, Ke, 2015. 民族主義與近代中日關係: 「民族國家」、「邊疆」與歷史認識 (titre en anglais : Nationalism and Modern Sino-Japanese Relations: Nation State, Borderland, and Historical Knowledge). Université chinoise de Hong-Kong.